Le Prince Nguyên Phuc VINH SAN est le 5è fils de l'Empereur THANH THAI et de sa cinquième épouse ayant rang de "Tai Nhân" (dernier rang des épouses
royales), dame NGUYÊN THI DINH, fille ainée de NGUYÊN VÂN THANH originaire de la province de Binh Dinh.
Intronisé par les puissances coloniales à la suite de "l'abdication" de l'Empereur, le jeune Prince de 7 ans sera le 11è souverain de la Dynastie des NGUYÊN et règnera sous le nom de DUY TÂN de 1907 à 1916.
" Autant dans l'intérêt de la France que pour le bien annamite, il fallait introduire dans le pays les
procédés d'administration et les moyens d'action économique de la civilisation européenne. Seul un obstacle sérieux aurait pu surgir dans la personne du jeune roi qui atteindrait prochainement sa
majorité. Mais en étudiant son caractère, ses goûts, ses aspirations, on pourrait soit en faire un auxiliaire de notre aide civilisatrice, soit le rendre inoffensif en ne lui laissant de la
royauté que les pompes, le luxe, le plaisir ". (Paul Doumer. L'Indochine Française. Souvenirs. Paris 1905. p. 164).
Pour ne pas avoir répondu aux attentes de cette mission "civilisatrice", l'Empereur DUY TÂN fut à son tour déchu en 1916, comme son père THANH THAI
(1879-1954) en 1907, comme son grand-père DUC DUC (1852-1883) emmuré vivant en 1883 à 31 ans après 3 jours de règne.
Détrôné le 13 Mai 1916, l'Empereur n'a JAMAIS ABDIQUE. IL EST LE DERNIER EMPEREUR D'ANNAM.
L'Empereur fut exilé à La Réunion où 29 années durant, il a courageusement reconstruit sa vie comme un simple citoyen dévoué à sa patrie d'adoption, la France. Il fut l'un des premiers à répondre à l'appel du 18 juin 1940 : Commandant des Forces Françaises Libres, il recevra la Médaille de la Résistance.
Sa rencontre à Paris, le 14 Décembre 1945, avec le Grand Homme, le Général de Gaulle, était chargée d'espoir et de promesses. Déjà il croyait
entrevoir, au bout du tunnel, sa Terre natale bien-aimée et ce sien Royaume.
Mais ce sera, au bout de son rêve éveillé, cette lumière blanche aveuglante qui le mena vers l'Au-delà, vers cet autre Royaume des Morts : son avion s'écrasa le 26 Décembre 1945 au dessus de Oubangui Chari, en République centrafricaine. On l'enterra avec ses 8 compagnons d'infortune dans le jardin de la Mission catholique de M'Baiki. Il faudra attendre encore 42 années pour que son Fils aîné, Monseigneur le Prince Impérial Guy Georges NGUYÊN PHUOC BAO NGOC-VINH SAN, soutenu par le Président Jacques CHIRAC, puisse ramener ses restes sur la Terre où veillent ses Ancêtres.
Ce 4 Avril 1987 ce fut un gouvernement socialiste avec l'ancien Premier Ministre PHAM VÂN DÔNG qui accueillit avec tous les honneurs dignes d'un
Chef d' Etat la dépouille du dernier Empereur, Héros de la Nation. Il aurait eu 87 ans.
Désormais il repose sur cette Terre que son coeur n'a jamais quittée, dans la Plaine des Tombeaux à An Lang. Au terme de tant d'épreuves, de combats, de
souffrances, le voilà promu Vigile de l'Eternité.
En vérité son Âme planait au-dessus de l'Annam et ses vétustes splendeurs depuis déjà longtemps, depuis ce jour où Elle fut libérée de son enveloppe
charnelle. Tout le reste, ces longues décades à attendre, c'est notre temporalité à nous autres vivants.
Les portes du Palais s'ouvrent, et le décor
Immuable est celui des époques lointaines;
Emaux, lotus sacrés, bois rares, porcelaines,
Haut portique de bronze où le dragon se tord.
Les Chefs d'Annam sont là, vêtus de soie et d'or.
Le gong sonne; un cri monte; et les têtes hautaines
Se courbent jusqu'au sol comme le riz des plaines
Incline les épis trop lourds de leur trésor.
Dans l'altier flamboiement du trône en laque rouge
Une tunique d'or dont pas un pli ne bouge......
Un point jaune, immobile et muet : l'Empereur.....
Un enfant ! mais grandi des grandeurs ancestrales,
Il sait déjà l'envers des pompes triomphales.......
Et l'âme de Gia-Long s'infiltre dans son coeur.
"Les Grands Lays" par Jacques Altar, B.A.V.H 1915,2,p.17
HUÊ, LA VETUSTE CITE DONT LE PRINCE EST
UN ENFANT.
* " Le choix se fixa sur le Cinquième fils du roi, le prince Vinh San, alors âgé de huit ans.......
La mère de ce nouvel élu ne vit point son élévation sans frayeur. Comme si elle avait prescience de la fin navrante de ce règne, elle s'accrocha aux habits de son enfant, quand on vint le chercher pour le sacrement. "Laissez-moi mon fils, je ne veux point qu'il soit roi !" s'écria t-elle. Quand on parvint à la détacher de celui qui allait posséder la toute puissance, elle s'arracha désespérément les cheveux et se meurtrit le visage. Pauvre femme ! Pauvre enfant !
Le métier de roi n'est pas à envier. Trop souvent, on paie chèrement la joie relative d'avoir gouverné les peuples. "
* (Mémoires de Son Excellence HUYNH CÔN, dit DAN TUONG ancien Ministre des Rites à la Cour d'Annam.
Revue Indochinoise tome XLII Sept.Oct.1924.) *
5 SEPTEMBRE 1907. Jour faste choisi par le SERVICE METEOROLOGIQUE ROYAL, le CONSEIL DES MEMBRES DE LA FAMILLE ROYALE, et la COUR DE HUÊ pour la CEREMONIE D'ELEVATION AU TRÔNE du Prince NGUYÊN PHUC VINH SAN, Empereur DUY TÂN.
La veille on avait présenté des offrandes d'encens et de cierges sur les autels de l'Esplanade du Nam-Giao, du Xa Tac et des tombeaux royaux pour informer le Ciel, la Terre et les Empereurs défunts du grand évènement.
Deux jours auparavant, le 3 Septembre 1907, après plus d'un mois d'internement au Palais de Cân Chanh, l'empereur du Dai-Nam (ou An-Nam) THANH THAI fut officiellement déposé. Voici la traduction de son édit d'abdication .
Service des Archives nationales de Dalat vol.72 - folio 25. Avec nos remerciements à NGUYÊN THÊ ANH
** " Investi par le Ciel (du mandat de faire) prospérer le cycle impérial, Nous, Empereur, décrétons ce qui suit
:
Le Souverain, étant maître du Ciel, de la Terre, des génies et des hommes, la dignité impériale est de la plus haute importance.
Avec Notre mince vertu, Nous avons renoué la grande chaîne de succession impériale et Nous avons régné à présent dix-neuf années. C'est grâce à la protection de la grande France et aux bons services de nos mandarins que Nous avons pu parvenir jusqu'à ce jour. Cependant, par suite de l'accumulation des soucis, il Nous est devenu excessivement pénible de continuer l'exercice de Notre humble charge.
En matière d'abdication, il y a déjà eu des précédents au temps de nos dynasties vietnamiennes des Trân et des Lê. Après avoir délibéré avec le noble Gouverneur Général Notre choix est porté sur le 5e prince Vinh San, qui mérite que Nous abdiquions en sa faveur, afin qu'il continue la garde des temples des Ancêtres .
Nous n'osons avoir en cela aucune arrière- pensée. Nous Nous retirons en notre palais particulier pour Nous reposer et Nous soigner. Pour les formalités qu'il y aura lieu d'accomplir, que le Conseil de La Famille Royale et les mandarins de la Cour confèrent avec le noble Gouverneur Général. Qu'on en informe la Capitale et les provinces par voie de proclamation afin que tous en aient connaissance.
Respect à ceci.
Le 26è jour du 7è mois de la 19è année Thanh Thai. " **
** L'abdication de Thanh Thai par Nguyên Thê Anh. Bulletin de l'Ecole française d'Extrême d'Orient. Année 1977. Volume 64. p. 255 à 264.
Acte purement formel puisque la destitution de l'Empereur avait eu lieu le 29 Juillet 1907 lorsque le lieutenant Prosper JOURDAN, inspecteur 2è classe, fut désigné pour une mission exceptionnelle : organiser l'isolement et l'investissement par surprise de la Cité Impériale "en vue de s'assurer, avec tout le respect dû à Sa Majesté", de la personne de l'Empereur Thanh Thai, d'en assurer la garde et la protection à l'intérieur du Palais. Sur ordre du Résident Supérieur LEVECQUE.
Pour cette mission le lieutenant P. JOURDAN disposait de la réunion de détachements de plusieurs brigades de la Garde
indigène et de la Garde royale, constituant 250 gardes "sûrs" encadrés par 6 Gardes Principaux français dont un interprète. Un autre inspecteur de la Garde indigène Léon SOGNY assurait la relève.
Devenu Chef de la Sûreté, ce sera ce dernier qui arrêtera 9 ans plus tard l'Empereur DUY TÂN....
Le jour même le souverain dut remettre les sceaux impériaux au Co Mât, constitué en Conseil de Régence sous la présidence du Ministre de l'Intérieur TRUONG NHU CUONG.
Acte pathétique imposé au monarque déchu qui n'avait pu apposer sur cet édit d'abdication aucun sceau, déjà confisqué.
SYLVAIN LEVECQUE STIGMATISé PAR SES PAIRS.
La déposition de THANH THAI et sa déportation ont provoqué des remous auprès de la population et les lettrés laissèrent éclater leur colère par une proclamation dénonçant les méfaits de TRUONG NHU CUONG et consorts. PHAN THUC HOA, auteur de cette proclamation, fut immédiatement arrêté et jeté en prison. L'opinion publique française s'en mêla. Lévecque fut rappelé en France pour calmer l'opinion mais devant le fait accompli aucun amendement n'a été fait.
" M. Lévecque doit porter les responsabilités de ses actes propres. Plus que ses prédécesseurs, il prête l'oreille aux rumeurs intéressées. L'ancien député d'arrondissement, promu d'un coup à des hautes fonctions indochinoises, directeur des Douanes et Régies, puis Résident supérieur à Huê, ne considérait pas le Roi autrement qu'un sous préfet - facile à faire sauter. S.M. Thanh Thai n'exerce aucun pouvoir, sa présence n'a jamais été une gêne pour la Résidence. Il ne se produisent que des incidents particuliers qu'il serait simple de ne pas faire naître...
Tant qu'il n'y avait à Huê que des Résidents supérieurs de carrière, le Protectorat avait fonctionné sans trop de soucis. Au hasard d'une intrusion politique, M.Lévecque, ancien député, d'abord nommé au Douanes et Régies, est envoyé auprès de S.M. Thanh Thai. Notre intérêt était de maintenir ce qui durait depuis vingt ans.....Le nouveau Résident supérieur entre en conflit tout de suite avec le Roi - qui est malade, qui est fou, dangereux, qu'il faut déposer. Malade ou fou, il n'y avait qu'à soigner le malheureux....Mais il avait manqué au Résident Supérieur....." Jean Ajalbert. "Les destinées de l'Indochine. Voyage. Histoire. Colonisation" .Paru chez L.Michaud 1909 p.118 et 251-252
" Sans méconnaitre les qualités de travail et d'activité de M. Lévecque je dois constater qu'il a manqué trop souvent de tact et de ce sens subtil de la diplomatie indigène indispensable à notre représentant à Huê."
Rapport n°1919 en date du 22 Juillet 1908 au Ministre des Colonies.
Archives du Ministère de la France d'Outre- Mer. Indochine N.F. Carton 50, dossier 589.
Vivant dans "l'intimité" de la famille impériale le lieutenant Prosper JOURDAN a fortement sympathisé avec le monarque
déchu. Avant de partir en exil pour la Cochinchine, THANH THAI lui vendit le 18 Octobre 1907, un pousse-pousse commandé au village Kinh-Luoc à Hanoi pour sa mère bien aimée l'Impératrice TU-MINH
veuve de l'Empereur DUC-DUC, décédée en 1906. Et aussi ce lit hérité de ses ancêtres qui a dû être monté dans la salle du Trône du Palais pour que l'Empereur puisse y dormir durant les 2
mois (Août à Septembre 1907) de son assignation à résidence. Vendu pour la somme de 400 piastres, signé de la main de Thanh Thai et contre une automobile. Le lieutenant reçut en cadeau le sabre
d'apparat à poignée d'ivoire et d'or et son fourreau en argent. Ces précieux souvenirs ont été conservés pieusement dans la famille pendant plus d'un siècle et ont fait leur apparition aux
enchères.
Voir : Souvenirs de Thanh Thai. Rouillac (cliquer)
Lire aussi : Illustration N° 3374 du 26 Octobre 1907. p. 265 à 269
Voir : Trésor de la Cour des Nguyên (cliquer) Merci mon Philippe Truong
En 1846, un bloc de jade de grande taille fut découvert dans le district de Hoa Diên (province de Hoang Nam) et offert à l'Empereur Thiêu Tri (1842-1847). L'Empereur ordonna d'en faire le Grand Sceau de l'Empire en remplacement de celui du seigneur Nguyên Phuc Chu.
Un dragon tournant autour de son corps, la tête hissée et la queue en panache, a été soigneusement sculpté pour servir de prise. A gauche et à droite de la base figurent, les inscriptions "achevé le jour faste, fête de Dai Tu" et "15è jour du 3è mois de la 7è année du règne Thiêu Tri (1847)". La mention "proclamé lors du sacrifice du Ciel au Nam Giao" gravée sur la face antérieure prouve qu'il a été officiellement présenté au Ciel lors du sacrifice du Nam Giao afin de bénéficier de la protection céleste. En effet le 15è jour du 3è mois, l'empereur Thiêu Tri célébra en personne "la Grande cérémonie demandant les instructions au Ciel et à la Terre", et sollicitant le soutien de ses Ancêtres pour que son Royaume puisse bénéficier encore longtemps de la fortune.
Après la cérémonie il fit graver neuf caractères :
"Mandat éternel du Ciel, sceau en jade pour la transmission de l'héritage de l'Empire du Dai Nam". L'Empereur publia l'édit :
" En ce jour Van Tho, le sceau en jade achevé, respectueusement nous choisissons le 1er de ce mois pour préparer en personne la cérémonie de présentation de
ce sceau en jade au Temple des Ancêtres avant de le ranger soigneusement dans le Palais Cân Thanh, avec le sceau Truyên Quôc tous deux solennels, pour prolonger la fortune et
témoigner des difficultés à développer le patrimoine, de le conserver. Il faut méditer ceci pour s'efforcer de continuer. Il faut être généreux pour bénéficier de la paix. Si par bonheur, cette
grande oeuvre pourrait être conservée éternellement, pour transmettre aux générations futures à jamais, ce serait une bonne chose ! ....." Photos
ci-dessous.
Ce sceau est utilisé sur les Ordonnances royales adressées aux pays vassaux et dans les promulgations pour le peuple. Il figure toujours sur la table centrale le jour de l'intronisation de chaque souverain.
Le 25 Août 1945, au Palais Kiên Trung, l'Empereur Bao Dai, lors de la signature de son Acte d'abdication, avait remis " le Sceau et l'Epée impériaux "
aux représentants de Hô Chi Minh, Trân Huy Liêu et Cu Huy Cân. Attributs régaliens qui ont pu être ainsi sauvés de la destruction tout au long du drame indochinois puisque les Palais Cân Thanh et
Kiên Trung ont été saccagés et brûlés en 1947.
En fait il existe en tout 3.000 objets provenant des Palais impériaux. Conservés secrètement dans les coffres de la Banque du Vietnam ces objets ont été transférés il y a quelques années au Musée National d'Histoire du Vietnam. Parmi ces objets on dénombre 85 cachets impériaux en or, argent, jade.
Certains ont fait leur 1ère apparition lors de l'année du Millénaire de la Création de THANG LONG - HANOI, célébré du Ier au I0 Octobre 2010. Ce
sont les sceaux montrés dans notre Page et exposés en 2010 au Musée de Hanoi cité plus haut.
D'autres ont été prêtés au Musée Guimet pour commémorer l'Année France - Vietnam, 2014
Exposition : L'envol du Dragon. Art royal du Vietnam. Musée Guimet 6 Place d'Iéna 75116 Paris (09 Juillet au 15 Septembre 2014). Catalogue Snoeck 192p. 30 euros Tél.01 56 52 53 00
Dès le 12 Septembre 1907 l'Empereur THANH THAI fut amené sous bonne escorte vers la Cochinchine, à Saigon puis à Vung Tau (Cap St Jacques) pour être mis
en résidence surveillée à la Villa Blanche.
Le 26 Octobre 1907, son frère le prince impérial BUU TOAN fut aussi éloigné et dut aller s'établir à Nhatrang avec sa famille.
NGÔ DINH KHA, Ministre des Rites, seul membre du Conseil aulique qui osa s'insurger contre la destitution de son Empereur fut mis à la retraite avec
rétrogradation de trois degrés, sans solde sous prétexte qu'il avait de lui-même fait ériger une église catholique dans la capitale.
On dota l'Enfant-Roi d'un Conseil de Régence composé de dignitaires proches du Résident Général :
TÔN THÂT HÂN Ministre de la Justice,
NGUYÊN HUU BAI Ministre des Travaux Publics,
HUYNH CÔN Ministre des Finances,
ANG-THANH-CONG MIÊN-LICH Président du Conseil du Tôn-Nhon,
VUONG DUY TRINH Ministre de la Guerre et
CAO XUÂN DUC Membre du Conseil de Régence et chef du Ministère de l'Instruction publique.
Enfin on chargea EBERHARD, Docteur ès-sciences et beau-père de J.E CHARLES (assistant de LEVECQUE), d'être le précepteur de DUY TÂN. Ce qui explique le français impeccable de l'Empereur.
L'enfant, dit-on, faisait preuve d'une intelligence remarquable, d'un esprit souple et vif, d'un caractère franc et enjoué.
il apprit aussi l'anglais. Il aima le violon puis le hautbois. Il aima monter ses poneys. Souvent dans les rues de Huê en calèche découverte, on voyait passer "Sa Jeune et Gracieuse Majesté, en
robe et turban jaune, escortée de cavaliers rouges, armés de la lance à oriflammes, et précédé de coureurs qui font faire place." H.Delétie, " Huê
Pittoresque ", B.A.V.H.1916, 2, p.127.
L'ENFANT ROI A GRANDI TROP VITE.
" UN JOUR DE TRÔNE A COMPLETEMENT CHANGE LE VISAGE D'UN ENFANT DE 8 ANS."
Relisant la prose de Paul Doumer, le technocrate du XIXès. dont nous admirons la magistrale administration des colonies et les efforts pour sortir le Pays du sous-développement et le projeter vers ce 20è siècle riche de prouesses techniques et de promesses scientifiques, je me demande comment un tel homme a pu ainsi méconnaître le tréfonds de l'âme des empereurs d'Annam, héritiers d'une longue lignée d'Hommes libres et indépendants, ayant toujours tenu victorieusement tête aux envahisseurs barbares, au mépris de leur propre vie. Ce malentendu entre l'Homme blanc, pur produit de la méritocratie républicaine, conscient de sa supériorité matérielle et les inébranlables convictions des Fils du Ciel revêtus de l'enveloppe charnelle pour guider leur peuple, fut la source d'un interminable Fleuve rouge de sang, de larmes, de haine, d'atrocités, de part et d'autre.
* " Incarnation visible du Ciel, Souverain Maître des génies Visibles et Invisibles, l'Empereur est plus qu'un Grand Prêtre : il est l'intercesseur désigné par le Ciel, à mi-chemin en quelque sorte entre le Ciel et la Terre.
C'est cela qu'aux yeux de tout un peuple cet enfant de huit ans incarne. Il est non seulement l'Empereur mais il est le légitime et véritable Empereur, héritier et continuateur d'une très longue lignée de princes qui, en plusieurs siècles ont fait l'ANNAM, et surtout du plus grand d'entre eux, GIA-LONG. " *
Le début du règne de DUY TÂN baignait encore dans l'atmosphère de révolte anti-française entretenue par les lettrés confucéens dont nombre de mandarins. La destitution de l'Empereur Thanh Thai permit au leader du "Mouvement contre les impôts" d'exploiter à fond le mécontentement populaire. Déclenché à Quang Nam et Quang Ngai en Mars 1908, ce Mouvement gagna rapidement les autres provinces de l'Annam où il fut accueilli favorablement par lettrés, notables et paysans. Qualifiée de "Rébellion" par le Résident supérieur et les Résidents de France, elle fut matée dans le sang par la Cour de Huê et les zélés mandarins provinciaux.
Ainsi les activités de Phan Bôi Chau, le leader des lettrés patriotiques, furent brisées, défaites.
L'Empereur n'avait que 9 ans à l'époque et pourtant il dit aux dignitaires de la Cour :
" S'il y a souvent des perturbations dans le pays, c'est que le peuple ne mange pas à sa faim. A partir d'aujourd'hui, sur ma
liste civile de 6.000 piastres je prélève 3.600$ pour être distribuées par vos soins aux pauvres. "
" Mouvement contre les impôts en Annam en 1908 à travers les Châu-ban du règne de DUY TÂN ". NGUYÊN THÊ ANH. Saigon. 1973. Ouvrage ronéotypé, non édité.
LES BREVES ANNEES DE REGNE : 1907 -
1916
Service des Archives nationales de Dalat. " CHÂU BAN . Le règne de DUY TÂN. "
On appelle CHÂU BAN les rapports au Trône soumis par le Conseil de Régence au Roi pour décision mais comme celui-ci était très jeune, ces propositions valaient
décisions définitives. Duy Tân les marqua juste d'un point rouge.
" Son jeune âge ne permet pas au jeune Empereur d'exercer par lui-même le pouvoir, qui est exercé en son nom par le Grand Conseil Privé, transformé en une
sorte de Conseil des Ministres, présidé par le Résident Supérieur en ANNAM, lequel représente le Gouverneur Général, Chef de la Fédération Indochinoise, dont l'ANNAM n'est que l'une des cinq
parties...Oh ! nous sommes bien loin des traités du Protectorat. Erreur et crime : l'Administration directe a remplacé le Protectorat, au point que les impôts ne sont même plus perçus, en Annam,
au nom de l'Empereur mais au nom de l'Administration française...." *
* E.P. THEBAULT : L'EMPEREUR DUY TÂN 1907 - 1916. Texte ronéonoté.
Mais l'Empereur reste le chef religieux suprême et dans ce rôle personne ne peut le suppléer. Il doit présider lui-même toutes les cérémonies religieuses et fêtes et c'est par lui ou en son nom que les sacrifices sont offerts. Les 2 principales cérémonies sont celles des Grands Lays en l'honneur même du trône, et, surtout tous les 3 ans, la grande cérémonie du NAM GIAO : officiellement, c'est un sacrifice en l'honneur du Ciel et de la Terre mais en réalité c'est une Fête du renouveau de la nature et de la végétation, du Printemps....
Toutes ces fêtes, tous ces sacrifices, le jeune Empereur les préside avec une gravité qui frappe tous les assistants.
** "....L'année 1909 me vit changer de fonction. M. Lê-Trinh décéda et je lui succédai comme Ministre des Rites. Je devais occuper ce poste jusqu'à la fin de ma carrière.
.......Comme gardien des vieilles traditions, il m'appartient, tout naturellement, d'instruire Sa Majesté de leur objet et surtout de lui indiquer minutieusement
le rôle qu'Elle allait avoir à remplir dans la grandiose manifestation du "Sacrifice au Ciel et à la Terre". Je n'ai certes pas la prétention de décrire ici cette imposante
cérémonie.
Je me contenterai de dire que le roi avait dix ans quand il dut pour la première fois, en 1909, se faire le mandataire de son peuple pour implorer la grâce
divine. Il y apporta le sérieux et la conscience dont il ne se départit jamais quand il s'agit des prérogatives et charges impériales.
.......Comme le veut la loi, Sa Majesté s'était rendue la veille du sacrifice, au Palais du Jeûne et Elle devait y attendre l'heure d'officier.....
De trois heures à six heures du matin, l'Empereur s'inclina, se prosterna, se releva, éleva les offrandes et refit maintes et maintes fois ces gestes fatigants. Nous étions à peu près certains qu'il ne pourrait aller jusqu'au bout de l'office. Il sut nous montrer ce que la volonté peut exiger d'un corps chétif....
Le Gouverneur Général, le Résident Supérieur, les fonctionnaires français résidant à Huê étaient présents à la cérémonie. Tous purent et
durent rendre hommage au zèle infatigable de cet enfant qui voulait attirer sur ses sujets le bonheur et la prospérité." **
( Mémoires de Son Excellence HUYNH-CÔN dit DAN TUONG ancien Ministre des Rites à la Cour d'Annam. Revue Indochinoise. tome XLII.
Sept-Oct. 1924.)
Ainsi passent les printemps, le peu d'enfance qui lui restait et les jeunes années de l'Empereur. Cérémonies religieuses, cérémonies publiques, revues de
troupes, fêtes...entrecoupées par bonheur, de villégiatures l'été à la station balnéaire de Cua Tung (province de Quang Tri) où enfin Sa Majesté pouvait retrouver quelques jeunes amis de son âge.
Et aussi aller pêcher aux côtés de simples manoeuvriers, avec l'autorisation de son précepteur Eberhard qui avait vite fait de s'attacher à son royal élève.
Parmi ces amis, il retrouva deux étés de suite (1914 et 1915) 2 élèves de 15 et 16 ans du Lycée Albert Sarraut de Hanoi, fils du Ministre de l'Instruction Publique Hô Dac Trung et aussi ses 2 filles. Il se fiança avec l'aînée née en 1901 mais rompit ces liens vers Décembre 1915. La jeune fille épousera plus tard l'Empereur Khai Dinh.
*** Mémoires de la bonzesse Diêu-Không, fille cadette du Ministre, née en 1904 : " Sa Majesté Duy Tân et la famille Hô Dac Trung " ;Ronéotypées, non publiées.
En 1915 il se fit construire, dans l'enceinte de la Cité Impériale, un petit palais plus simple, plus intime avec le confort moderne.
Très tôt l'Empereur s'intéresse aux affaires publiques et on le tient au courant des questions politiques. Avec les années il prend conscience de
son rôle, de ses droits et surtout de ses devoirs. Mûri par les épreuves, il était très en avance sur son âge. Autour de lui, tous veulent secouer le joug de l'administration française qui durcit
son absolutisme en raison même de l'opposition qu'elle rencontre....Tous les lettrés mécontents tournent leurs regards vers le Trône...
" A cette époque Duy Tân était déjà marié. Je revins à la Capitale un jour d'audience. Les hauts mandarins rencontrés me recommandèrent : "Si vous voyez Sa Majesté, ne faites que répondre à ses questions et ne lui parlez de rien d'autre". A la fin de l'audience, l'Empereur me manda. Il était alors assis dans une petite chaise dans l'aile Est du Palais Cân Thanh. Il demeurait silencieux, l'air mécontent et le regard porté ailleurs.......Après un long moment, il rompit le silence et me questionna :"La population de Quang Tri a faim,cet état de choses a t-il cessé ?" Je lui rendis compte de la situation améliorée de cette province et, comme il ne dit rien, je pris congé de lui. Je sus par la suite que quelques mois auparavant il avait ordonné à la Cour de lui préparer un nouveau traité avec la France.
Comme la Cour avait tergiversé et que la Résidence Supérieure en avait été avisée, il entra dans une colère bleue et depuis lors, il y eut comme un fossé entre lui et la Cour."
**** Mémoires de Son Excellence Nguyên Vân Mai alias Tiêu Cao, chef de la province de Quang Tri traduites par son fils Nguyên Hy Xuoc : " Lô-Giang Tiêu-Su " en caractères chinois. Ronéotypées.
L'Empereur avait aussi sévèrement blâmé tous les Ministres dans "l'affaire des Tombeaux" lorsqu'il apprit les fouilles entreprises par le Résident Supérieur Mahé et le délégué de La Susse pour chercher le soi-disant trésor caché de la Tombe de TU DUC. Pour lui c'était une violation des tombeaux de ses ancêtres.
ENFIN LE 30 JANVIER 1916 L'EMPEREUR DUY TÂN SE MARIE.
** ".....Le maître mit cela sur le compte d'un éveil des sens et d'un tourment corporel qui se manifestait d'une façon
déréglée. Il nous conseilla donc de chercher trois femmes pour Sa Majesté. Le 30 Janvier 1916 eut lieu alors la célébration du mariage de l'Empereur avec la quatrième fille de son précepteur, M.
Mai Khac Dôn. D'autres femmes partagèrent, en outre, la couche royale, puis elles furent abandonnées les unes et les autres. Sa Majesté n'ayant point trouvé plaisir à ce
jeu." (HUYNH- CÔN, ancien précepteur, devenu Ministre des Rites) **
A ma chère bien aimée
..Et j'écartais sur la fenêtre des anges,
Et je te regardais dormir sur les langes
J'effeuillais des jasmins et des oeillets sans bruit
et je priais, veillant sur tes paupières closes,
et mes yeux se mouillaient de larmes songeant aux chose qui nous attendent dans la nuit.
DUY TAN
L'Impératrice avouera lors de notre rencontre qu'elle ne lisait pas le français et n'avait pas compris à l'époque toute la beauté de ces vers. La plupart
des poèmes de l'Empereur furent saisis par la Résidence en Mai 1916.
En fait, pressé par la Reine Mère de prendre épouse l'Empereur choisit comme "Hoang-Quy-Phi" la fille aînée de son précepteur MAI KHAC DÔN de la province
de THUA-THIÊN. La jeune MAI THI VANG est née en 1899, un an de plus que l'Empereur. Bien que vêtue modestement et sans bijoux (son père était un mandarin intègre) elle fut choisie pour sa beauté
éclatante. " Mon maître vénéré, dit l'Empereur, vous vous êtes donné beaucoup de peine pour m'instruire, je voudrais devenir votre gendre pour vous témoigner ma
gratitude."
Les fiançailles furent célébrées dans la demeure familiale du Précepteur à Kim Long et le 31 Janvier 1916 la cérémonie "Nap Phi" eut solennellement lieu au Ministère des Rites où logeait Mai et sa famille.
Mariage fastueux qui dura 3 jours et 3 nuits.
Les jeunes époux s'installèrent au Palais Kiên Trung, l'Empereur occupa l'aile gauche, l'Impératrice, l'aile droite. la pièce du milieu était réservée au culte du Général TRÂN HUNG DAO, divinisé.
Ce petit Palais fut reconstruit en 1923 par l'Empereur Khai Dinh puis redécoré en 1935 par LELEU pour l''Impératrice Nam Phuong qui fit installer la 1ère salle de bains; il a été saccagé et brûlé par le Viêt-Minh en 1947.
Le couple impérial y a résidé un peu plus de 3 mois jusqu'à la fuite de Duy Tân la nuit du 3 Mai 1916; la jeune impératrice était alors enceinte mais au
moment de s'embarquer au Cap Saint Jacques à destination de la Réunion elle fit une fausse couche qui la rendit stérile pour toujours.
1916. UN PRINTEMPS, UN ETE, UN
AUTOMNE AU PURGATOIRE
Le 4 mai 1916 le complot ourdi par le jeune Empereur et ses conseillers TRÂN CAO VÂN et THAI PHIÊN fut éventé par une indiscrétion puis une dénonciation.
Arrêté l'Empereur assuma ses responsabilités et refusa de trahir ses complices. Au moment de son arrestation à Tam-Thai un de ses gardes du corps se pendit à un arbre, tous les autres furent
menottés.
Parmi les français ayant participé à l'arrestation de l'Empereur Duy Tân dans la matinée du 6 Mai 1916 étaient présents Le Fol, Directeur de cabinet du Résident Supérieur et Léon Sogny, Chef de la Sûreté de Huê. Après un salut très protocolaire, Le Fol demanda à Duy Tân :
- " Eh bien Sire, vous avez fini cette randonnée ?
- " Vous ne pouvez pas comprendre ! répondit froidement l'Empereur.
Quand il fut ramené à Huê et mis en présence du Résident Supérieur Charles celui-ci lui serra la main en demandant :
- " Eh bien Sire, vous êtes content de votre équipée ?
- " Non ! Puisqu'elle n'a pas réussi ! répondit sèchement Duy Tân qui s'enferma alors dans un mutisme absolu et gardait une attitude hautaine jusqu'à sa déportation.
Après cette courte entrevue avec le Résident Supérieur Charles, Duy Tân fut emmené en auto décapotable faire un tour en ville, assis entre Le Fol et Léon Sogny pour que la population sût que le roi était déjà tombé aux mains des Français. Il fut ensuite séquestré à Tam Toa, dans la Citadelle de Huê, sous la responsabilité du Dê-Dôc du Hô-Thanh (Directeur de la Citadelle) nommé Vo-Ban.
Les envoyés de la Cour et de la Résidence Supérieure, ainsi que sa mère et sa jeune épouse essayèrent de le convaincre de retourner sur le trône. Au Gouverneur Général ROUME venu exprès du Tonkin, il répondit :
" Vous voulez me forcer à être Empereur d'Annam ? Eh bien, veuillez me considérer comme un Roi majeur, supprimez le Conseil de Régence et laissez-moi
toute liberté d'action, surtout celle de correspondre directement avec la Métropole.
Perplexe, ROUME ne cacha pas qu'il est partisan de la suppression de la Royauté en Annam. Mais la France était en guerre, était-ce un moment propice pour risquer les troubles qu'entrainerait une pareille réforme ? "Nous ne pouvons vivre sans roi, si le peuple n'a plus de roi il se révoltera" lui disent tous les Ministres consultés. "Qu'il en soit fait selon votre désir" conclut ROUME.
Le 10 Mai 1916, le Conseil de la Famille Royale et le Conseil Secret proposèrent au Gouverneur Général ROUME, la déposition de DUY TÂN et l'intronisation du prince BUU-DAO, fils aîné de DONG-KHANH.
Propositions approuvées le 13 Mai 1916.
Le 17 Mai 1916, le Prince BUU-DAO fut intronisé sous le nom de règne de KHAI-DINH.
Après cette investiture, le protectorat transféra le Prince VINH SAN, ex-Empereur DUY TÂN au poste de Mang Ca sous la garde des soldats français.
Sur ces entrefaites Paris nomma le Résident Supérieur CHARLES à Hanoi comme Gouverneur Général et le nouveau Résident Supérieur en Annam Monsieur LE MARCHANT de TRIGNON fit connaître à la Cour de Huê qu'il convient de punir ce "crime de trahison caractérisé" de la peine de mort pour servir d'exemple aux futurs empereurs.
Ainsi les autorités coloniales furent-elles obligées de charger le Ministre de l'Instruction publique, le futur beau-père de l'empereur Khai Dinh, HÔ DAC TRUNG, d'intenter un procès à l'encontre de l'Empereur pour trahison.
Les vieux instigateurs du complot, TRÂN CAO VÂN et THAI PHIÊN (qui devait être Commandant en chef des forces de la Capitale Huê) prirent tout sur eux. Le Ministre les condamna à la peine capitale et ils furent décapités à An Hoà, ainsi que TÔN THÂT DÊ, NGUYÊN QUANG SIÊU (qui devaient commander les corps de gardes royaux qui tiendront la Citadelle) PHAN THANH CHUONG et bien d'autres . Quelques uns se suicidèrent en prison sans pour cela éviter que leurs cadavres fussent redressés et décapités.
Les autres furent condamnés à l'emprisonnement ou à la déportation à Poulo Condor, Bao Lao...
Avant de mourir TRÂN CAO VÂN fit parvenir au Ministre 2 sentences parallèles écrites sur un bout de papier à cigarettes :
" Sujets fidèles ! Hommes d'honneur ! Dignitaires portés aux plus hautes fonctions ! Où êtes-vous ?
Laissez-vous un patriote, tombé aux mains de l'ennemi, mourir d'une mort violente ?
Le Ciel , la Terre , la Patrie sont encore là. Pourvu que Sa Majesté ait la vie sauve !
"
Le Conseil Secret (Co Mât Viên), sur les recommandations du Ministre de l'Instruction Publique rédigea en ce sens la sentence suivante concernant l'Empereur :
"L'Empereur Duy Tân est encore mineur.....
A vrai dire, s'il est coupable, il l'est bien vis-à-vis du Gouvernement du Protectorat, mais nullement vis-à-vis de son Gouvernement et de son peuple. Par ailleurs, la révolte projetée n'a pas encore éclaté et partant, n'a encore causé aucun tort aux Français de Huê et des autres provinces de l'Annam tant en biens privés qu'en vies humaines. En outre Duy Tân est très estimé de son peuple. Dans ces conditions sa condamnation à mort ne manquerait pas de susciter des troubles parmi la population. Tant du côté français que de notre côté, nous devons éviter à tout prix cette éventualité, surtout au moment où la France est aux prises avec des difficultés graves causées sous le ciel d'Occident par les envahisseurs allemands. Il s'avère donc prudent de se montrer indulgent envers le jeune monarque en le destituant tout en lui laissant sa liberté et son ancien titre de prince. Cette sentence, outre qu'elle est judicieuse, montrera à tout le monde la magnanimité de la France. "
Ainsi, le jeune Empereur, encore mineur, a t-il échappé à la peine capitale et fut condamné à l'exil.
Le 2 Juillet 1916, le Prince VINH SAN fut convoyé par chemin de fer à Tourane, puis de là, sur une vedette garde-côtes de la Douane jusqu'au Cap Saint Jacques (Vung Tau) en Cochinchine où se trouvait déjà son Père THANH THAI, en résidence surveillée depuis 1907. Dans la foulée on embarquera sur le même bateau ce géniteur encombrant.
LE SOUVERAIN DECHU AVAIT 16 ANS et 9 ANNEES DE REGNE DERRIERE LUI. Son Père THANH THAI avait 37 ans, il était dans la force
de l'âge, "un beau jeune homme exubérant de santé et de vitalité". 32 années après, à son retour d'exil en Cochincine en Mai 1947 il n'était plus qu'un vieillard voûté aux cheveux
blancs.
LA ROUTE DE L'EXIL
C'était sur le GUADIANA, que l'Empereur DUY TÂN, à présent NGUYÊN PHUC HOANG - Prince VINH SAN fut embarqué au Cap Saint Jacques avec sa Famille le 3
Novembre 1916. Au bout de cette traversée de 17 jours sans escale le cargo mixte arrive en vue des côtes de Saint Denis de La Réunion à 7h.30 du matin, le 20 Novembre 1916. Aussitôt le Secrétaire
Général De La Vigne Sainte Suzanne, le Capitaine Deroche et le Chef de la Sûreté vinrent à la rencontre des illustres "Invités" avec un petit train spécial. Il y avait à bord
:
- le Prince VINH SAN - Empereur DUY TÂN, 17 ans et son épouse la "Hoang Nhu Phy" MAI THI VANG, 18 ans.
- la Mère du Prince, la "Tai Nhân" NGUYÊN THI DINH et CUONG sa fille âgée de 12 ans, soeur du Prince, plus tard mariée à l'avocat
VUONG QUANG NHUONG. C'était elle qui avait plaidé auprès de Monsieur Emile BOLLAERTT, Haut-Commissaire de la République en Indochine, pour le retour de son père, l'Empereur THANH THAI en Mai 1947
en Cochinchine.
- Son père, l' Empereur THANH THAI, présentement NGUYÊN PHUC CHIÊU - Prince BUU LAN, 37 ans et ses 2 autres épouses, 2 soeurs, filles
d'un Tri Phu domicilié à Bao Vinh (croyait-on à l'époque) :
° la "Giai Triêu" HÔ THI NHAN et son fils de 9 ans, le Prince Vinh Chuong.
° la "Chi Lac" HÖ THI MUNG et ses 2 fils, les Princes Vinh Luu âgé de 9 ans et Vinh Quynh, 2 ans.
Par le journal de La Réunion "Le Peuple" de Novembre 1916, nous savons que les 2 Princes étaient vêtus à l'européenne, en blanc, les Dames, en tunique nationale, étaient "couvertes de bijoux". Il y avait en tout 16 personnes, serviteurs compris, transportant un coffre-fort et 10m3 de bagages. Les exilés perçoivent une rente de 30.000 frs pour THANH THAI et 10.000 frs pour DUY TÂN. On est très loin des millions de francs-or versés à l'Empereur HAM NGHI lors de son exil en Algérie.
".....Ma mère que vous avez peut-être vue là-bas en ce temps là, y est toujours et ce n'est que par elle que je suis rattaché au
pays....
En vous écrivant, je revois le gris bleu des rochers coupés en dentelle parmi le chaos, les plaques jaunes des herbes rares qui çà et là
mouchètent l'alpestre symphonie.
"....Hélas ! Les portes de bronze du Palais ne reverront plus jamais mes pas d'homme, elles qui virent l'enfant-roi les franchir au galop de ses
poneys, l'adolescent les passer en grand apparat, grave et triste, comme pressentant sa sombre destinée. Je vous envoie (mais avec prière de me la retourner car c'est un souvenir) ma photo à
l'âge de dix ans, avec le manteau et la couronne de Rex Imperator. Cette couronne a coûté la vie à bien des miens et à moi, me coûta la liberté......"
Lettre à son ami le Dr Estrade, à Madagascar et datée
Saint-Denis, le 7 décembre 1937.
Arrivé à Saint Denis le Prince tomba gravement malade et dut rester confiné dans une vieille maison des hauts de la ville, puis après sa convalescence
qu'il passa dans la région d'Helbourg il revint dans la Capitale et s'installa dans une assez jolie maison au coin des rues Jules Auber et Labourdonnais.
" J'avais 17 ans. Complètement dépaysé, je m'acclimatais difficilement à La Réunion. La fièvre me tenaillait fréquemment et j'eus 3 accès de bilieuse hématurique..." (Interview accordée à Ch. Wateblet, membre de la Presse Française).
Avec courage et énergie le Prince combat l'adversité. Il reprend ses études, passe son baccalauréat à Saint Denis, s'intéresse au droit et aux langues dont l'anglais et l'espagnol. Plus tard il obtiendra une licence de Droit. Il se lance dans la radio-électricité encore balbutiante avant d'en faire son métier.
Il passe ses loisirs à jouer du violon, élever des chevaux de course, s'exercer à l'escrime, donner des conférences littéraires ou scientifiques, composer des poèmes, écrire des articles de journaux, faire de la photographie.... Par deux fois il a été lauréat de l'Académie des Sciences et des Arts de La Réunion.
Ainsi il était très estimé de la population locale .
Après 2 ans passés à La Réunion sa jeune épouse, sa mère et sa soeur obtiennent l'autorisation d'être rapatriées en Indochine.
Toujours tenu par les liens du mariage, le Prince refera sa vie comme il pouvait, aura une autre famille, nombreuse.
Nous avons retrouvé le 4I rue Labourdonnais à Saint Denis. C'était là au 41, à l'angle avec la rue Jules Auber que
le Prince avait installé son " RADIO - LABORATOIRE VINH SAN Tél.
2.09 Appareillage radio-électrique Dépannage - Réparation " qui deviendra vite le rendez-vous des radios amateurs. C'était là aussi qu'il avait, le premier, capté
l'appel du 18 Juin....
L'ancien Empereur d'Annam était ainsi devenu réparateur de postes de TSF. Il avait vite acquis une telle compétence que des revues spécialisées pour les sans-filistes amateurs publient des articles et des études purement techniques rédigées par lui. Le Gouvernement de La Réunion le chargera de construire le premier poste émetteur-récepteur officiel de l'île.
Nous remercions vivement Son Altesse Impériale Monseigneur le Prince Guy Georges NGUYÊN PHUOC BAO NGOC-VINH SAN, fils aîné de l'Empereur DUY TÂN, de nous avoir confié 2 documents importants qui nous ont aidés à rédiger cette page web :
1/ E.P. THEBAULT. Docteur en Droit, Ancien Magistrat. Ami fidèle de l'Empereur DUY TÂN
" L'Empereur DUY TÂN, 1907-1916 ou le Prince VINH SAN 1900-1945 ". C'est un témoin important des derniers jours de l'Empereur à Paris où il venait de rencontrer le Général de Gaulle.
2/ Professeur HOAN TRUONG THUONG ." HO SO DUY TÂN ". Editeur MO LANG San Francisco USA 1993
Traduction française in extenso.
Nous n'oublions pas les autres livres ci-dessous qui nous ont tenu compagnie depuis un demi-siècle.
3/ PAUL MUS.
4/ PHILIPPE DEVILLERS Editions du Seuil. Paris 1952
**** UNE IMMENSE ESPERANCE.
Dans le 3è tome de ses Mémoires de guerre, le salut 1944-1946, le Général de Gaulle envisage une option, qu'il veut encore garder secrète, mais qui trancherait une fois pour toutes l'avenir des relations entre la France et le Vietnam.
De ce "dessein secret", il fit part, le 26 mars 1945, au capitaine de Boissieu qui avait appartenu à Londres à son état-major particulier et qui, la
veille, avait été prévenu qu'il était affecté au cabinet du chef du gouvernement alors qu'il servait dans la division Leclerc. De Gaulle songeait à faire appel au Prince VINH SAN. Boissieu devait
le prendre en charge et informer de Gaulle de ce qu'il pensait et croyait pouvoir faire. S'il était choisi c'était parcequ'il avait déjà rencontré le Prince quand il accompagnait le général
Legentilhomme, haut-commissaire de France en Océan Indien, à Madagascar.
Le Général et le Prince se virent le 14 Décembre 1945. Ils s'entendirent sur ce qu'il y avait à faire dans l'immédiat : Duy Tân reviendrait sur le trône
dès que la France aurait repris pied en Indochine et quand les lignes générales d'un règlement politique seraient arrêtées, de Gaulle viendrait sur place le conclure solennellement. Duy Tân, en
tout cas, n'avait caché ni sa volonté de réunifier son pays ni sa conviction qu'il devait être indépendant à bref délai. ****
Page 230. Tome III " Mémoires de guerre , le salut 1944 - 1946 " . Général de Gaulle.
...... Aux fins qui pourraient être utiles, je nourris un dessein secret. Il s'agit de donner à l'ancien Empereur Duy-Tân les moyens de reparaître, si son successeur et parent Bao-Dai se montre, en définitive, dépassé par les événements.
Duy-Tân, détrôné en 1916 par l'Autorité française, redevenu le Prince Vinh San et transféré à La Réunion, a néanmoins, au cours de cette guerre, tenu à servir dans notre Armée. Il y a le grade de Commandant. C'est une personnalité forte. Quelque trente années d'exil n'ont pas effacé dans l'âme du peuple annamite le souvenir de ce souverain. Le 14 Décembre, je le recevrai, pour voir avec lui, d' homme à homme, ce que nous pourrons faire ensemble. Mais quelles que soient les personnes avec qui son Gouvernement sera amené à conclure des accords, je projette d'aller moi-même les sceller en Indochine dans l'appareil le plus solennel quand le moment sera venu. "
***** La secrète entente De Gaulle Leclerc pour la Libération. page 5, 6, 7. (cliquer)
LES AILES FRACASSEES
Dans une lettre datée du 10 Novembre 1945 à son ami Thébault, le Prince VINH SAN terminait par un cri de joie : "Le Général de Gaulle vient de prendre un décret * qui me nomme :
- Sous-lieutenant le 5 Décembre 1942,
- Lieutenant le 5 Décembre 1943,
- Capitaine, Décembre 1944,
- et Chef de Bataillon le 25 Septembre 1945.
* Décret en date du 29 Octobre 1945.
Le 16 Décembre 1945 le Prince VINH SAN revoit son ami le magistrat E.P THEBAULT, ancien chef de cabinet du Gouverneur de La Réunion, CAPAGORRY. Ce
dernier venait d'arriver à Paris et dans l'après-midi les 2 amis étaient allés lui rendre visite. Le Prince logeait à l'hôtel du Louvre face au Théâtre-Français. "Sanglé dans une belle tenue à
quatre galons", enthousiaste il racontait en détails son entrevue avec le Général 2 jours auparavant. Au cours de la soirée, à son ami qui faisait allusion à quelque cérémonie possible
d'intronisation, le Prince l'interrompit brusquement : " Mon cher ami, il n'y a lieu ni à investiture, ni à intronisation, ni à un sacre quelconque : je n'ai jamais abdiqué et je suis toujours
légalement, l'Empereur.
Je rentre chez moi. C'est tout. Je reprends mon fauteuil comme si je revenais de voyage....".
Le lendemain, 17 Décembre, le Prince dînait avec son ami THEBAULT à la brasserie Lipp, à Saint Germain des Prés. Mais là, changement de ton : le Prince était plein d'inquiétude et de
pressentiments, il n'avait plus sa "verve gouailleuse". Sur le chemin du retour vers son hôtel, le Prince dit à son ami : " Je vais donc retourner en Indochine, peut-être pour recevoir une
bombe ou un coup de poignard....Que voulez-vous ? Chacun a son destin, et l'on n'y échappe pas. Le poignard, la balle ou la bombe, c'est le destin des Princes. J'envisage cette perspective sans
peur et sans effroi. Le jour où je tomberai ainsi, j'aurai accompli mon devoir, celui que le Destin me créée, j'aurai fait ce pourquoi je suis Prince. Mais je ne me déroberai
pas....."
Avant de quitter son ami, alors qu'ils traversaient les jardins des Tuileries, il lui dit, bien dans les yeux, le tutoyant, fait rare : " Vois-tu mon vieux Thébault, quelque chose me dit que je ne régnerai pas ".
Mais avant son retour en Annam prévu en Mars 1946, le Prince tenait à revoir sa petite famille à La Réunion et mettre ses affaires familiales en ordre.
Le 1er Décembre 1945, sa dernière compagne, Marie Ernestine Maillot lui a donné une petite fille, Marie Gisèle Andrée, qu'il n'a pas encore vue. De sa précédente compagne, Fernande Antier, il a
déjà 4 autres bambins qui l'attendaient avec impatience pour les Fêtes.
Au Cabinet du Général on lui avait donné un ordre de mission quelconque pour qu'il n'ait pas à payer les frais de son voyage.
Le 24 Décembre 1945, au Bourget, le Prince s'embarqua sur le Lockheed Lodestar C60 immatriculé F-BALV, des Lignes Aériennes Françaises qu'exploitait auparavant le colonel Lionel de MARMIER.¤ et effectuant la liaison France-Madagascar via Alger (ligne 119).
Le 26 Décembre il était à Fort-Lamy au Tchad après avoir fait escale à Alger. L'appareil quittera Fort-Lamy le 26 à 13h50 pour une nouvelle escale, à Bangui.
Vers 18h30 G.M.T, près du village de Bossako, subdivision de M'Baiki,département de la Lobaye, territoire de
l'Oubangui-Chari, l'avion s'écrasait. Il n'y eut aucun survivant : en tout 9 corps à moitié calcinés. L'équipage se composait d'un commandant et de deux lieutenants; il transportait deux
militaires dont le Prince et quatre civils dont une femme. Le Prince fut inhumé avec les honneurs militaires, à côté de ses 8 compagnons d'infortune, dans le terrain jouxtant la Mission
Catholique de M'Baiki. Sur sa tombe fut gravée cette inscription voulue par le Prince avant sa mort :
" J'ai conscience d'avoir servi la France comme j'ai servi mon propre pays "
Le Général de Gaulle, comme l'Amiral d'Argenlieu fut très affecté par cette mort qui rend dubitatifs certains auteurs. Nous leur laissons le soin d'en débattre.
- SAHEL H. Lt-Colonel. " Destin tragique d'un Empereur ". Revue Economique Française. 1967 N° 3 et 4 . Ouvrage ronénoté. PARIS. 1963. En annexe, très nombreux documents et plusieurs lettres du Prince.
¤¤ - CHAFFARD Georges." Les Carnets Secrets de la Décolonisation ". Calmann-Lévy éditeur. PARIS 1959
¤ Le 30 Décembre 1944, soit une année auparavant presque jour pour jour, le
colonel Lionel de MARMIER trouvait la mort à 47 ans, en plein ciel au-dessus de la
Méditerranée avec 12 autres personnes dans l'accident d'un bi-moteur Lockheed C60 qui le ramenait d'Alger en France. Exactement le même type d"avion que celui
pris par le Prince. Le colonel venait à Paris pour prendre la direction d'Air France. De 1941 à 1944 il était chargé par le Général de Gaulle des Liaisons Aériennes de la France Libre entre le
Moyen-Orient et les territoires d'Afrique rattachés à la France Libre. A la Libération, lors de la descente des Champs-Elysées le 25 Août 1944 il était placé sur le même rang que les
généraux.
¤¤ Georges Chaffard évoquent deux autres accidents aussi incompréhensibles à cette époque, en terre africaine et sur la même ligne Paris-Océan Indien. Celui de l'épouse du Général Pierre de SAINT MART (1885-1965), Gouverneur intérimaire de l'Oubangui Chari en 1939 puis Gouverneur Général de Madagascar (1943 à 1946) après le départ du Haut Commissaire, le Général Legentilhomme.
Son avion s'écrasait en Afrique alors que Mme de SAINT MART convoyait vers la France une somme de 20 millions, dit-on, en numéraires et pierres précieuses, fruits de collectes et de dons destinés à une "Oeuvre des enfants de France" dont elle était Présidente pour Madagascar. De Tananarive, le Général de SAINT MART chargea son aide de camp d'aller sur les lieux récupérer, si possible, le trésor. L'avion qui le transportait s'écrasa à son tour.
¤¤¤ Quatorze ans plus tard, le 29 Mars 1959, l'avion du Père Fondateur de la République Centrafricaine - ex Oubangui Chari - le Président Barthélémy BOGANDA (1910-1959) s'écrasera à Boda, Préfecture de la Lobaye, en pleine forêt équatoriale, alors qu'il rentrait de Berberati, à l'Ouest, on parlera aussi d'assassinat. Né Prince congolais de la noblesse Teke il disait : " Je fus Congolais, je suis maintenant Centrafricain ".
LES ÂMES DEFUNTES
** L'histoire des soeurs HÔ THI NHAN et HÔ THI MUNG qui ont suivi l'Empereur THANH THAI à La Réunion mérite d'être contée : elles reposent aujourd'hui dans le cimetière royal de AN LANG sous le nom de NGUYÊN CÔNG NHAN et NGUYÊN CÔNG MUNG. Avec la Reine NGUYÊN THI DINH, mère de L'Empereur DUY TÂN elles étaient les dernières épouses qui restaient. Les autres furent, soit chassées après le départ de THANH THAI, soit, affectées comme "servantes du culte rendu aux impériales mânes", c-à-d, affectées à l'entretien des tombes royales.
La Princesse (Giai Triêu) NHAN a donné à l'Emperereur 2 fils : les Princes Vinh Chuong (1907-1948) et Vinh Giêu (né en 1924 à La Réunion, résidant actuellement à Houston, U.S.A).
La Princesse (Chi Lac) MUNG a donné en tout 5 fils : Vinh Luu (1907-1948), Vinh Quynh (1915,décédé prématurément), puis 3 autres garçons nés à La Réunion : Vinh Khôi (1919-1969), Vinh Giu (1922-2007), Vinh Câu (1924- ? ).
Les vrais noms de ces Princesses sont Công Tang Tôn Nu Nhan et Công Tang Tôn Nu Mung, petites-filles paternelles du Roi Minh Mang. Ce qui veut dire qu'elles sont en vérité les tantes paternelles de leur époux THANH THAI, Prince BUU LAN, fils du Prince UNG CHÂN-Empereur DUC DUC. Pour cacher cet état, les registres royaux ont changé leur nom en HÔ puis en NGUYÊN CÔNG patronymes sous lesquels elles ont été inhumées à AN LANG.
Ce genre d'union est plus fréquent encore au Cambodge, voisin de l'Annam : ainsi le défunt Roi Sihanouk (1922-2012) a épousé en 1942 et en 2ème noces sa propre tante la Princesse Sisowath Pongsamoni (1923-1974) qui lui a donné 4 fils et 2 filles. Par la suite sa fille aînée la Princesse Bopha Devi (1943) épousa en 1967 l'Oncle de son père le Roi, le Prince Sisowath Chivan Monirak (1936). Par alliance avec sa tante le Roi fut son propre oncle et neveu. La Princesse Bopha Devi, sa fille devenue sa tante, il en résulte que le Roi fut aussi son grand-oncle et petit-neveu. De quoi donner "mal aux cheveux" aux généalogistes Blancs.
De ses huit épouses l'Empereur THANH THAI avait 28 enfants.
Bien plus limpide est la DESCENDANCE DE L'EMPEREUR DUY TÂN.
L'Empereur DUY TÂN, Prince VINH SAN a laissé 6 enfants.
~ De son union avec Mademoiselle Fernande ANTIER, une jeune fille de Salasie, qui lui a donné 8 enfants dont 4 encore en vie :
- Rita Suzy Georgette, née le 6 Septembre 1929.
- Guy Georges, né le 31 Janvier 1933.
- Yves Claude, né le 8 Avril 1934.
- Joseph Roger Expédit, né le 18 Avril 1938.
Madame Fernande ANTIER est décédée le 12 Février 2005 en France et inhumée en Charente-Maritime.
~~ De son union avec Mademoiselle Marie Ernestine MAILLOT, une jeune fille de Saint-Benoît :
- Marie Gisèle Andrée, née le 1er décembre 1945, décédée le 29 Janvier 2011.
Ses 5 enfants seront reconnus légalement, par jugement du Tribunal de Saint Denis du 22 Juillet 1946, conformément aux volontés expresses de leur Père et portent légitimement le nom de VINH SAN .
~~~ Un autre enfant Armand VIALE né en 1919, porte le nom de sa mère Marie-Anne VIALE.
Nous remercions Son Altesse Impériale Monseigneur le Prince NGUYÊN PHUC BAO NGOC-VINH SAN de nous avoir transmis quelques photos inédites de sa collection privée.
Sur la photo ci dessous :
SAI le Prince BAO VANG (Yves Claude 1934), SAI le Prince BAO NGOC (Guy Georges 1933), Mà (Maman 1913-2005), SAI la Princesse TÔN NU (Rita Suzy Georgette 1929), SAI le Prince BAO QUY (Joseph Roger Expédit 1938).
LE RETOUR - UNE SI LONGUE ABSENCE : 71 années
3 NOVEMBRE 1916 : EMBARQUEMENT POUR L'EXIL - 4 AVRIL1987 : RETOUR SUR LA TERRE NATALE
Voir : vinhsan.free.fr (cliquer)
Nous vous remercions de vous reporter à la page établie par le Prince Claude
VINH SAN lors du Centenaire de la naissance de L'Empereur. Elle résume en photos les grands moments de ce destin tragique.
Outre cette page Web il existe 2 Ouvrages malheureusement épuisés mais nous espérons les revoir bientôt.
AN LANG. DIALOGUE AVEC L'INVISIBLE
A 2 km de Huê, vers Huong Thuy, dans le Village de An Cuu, se trouve AN LANG, le Mausolée de la PAIX.
Ce fut l'Empereur THANH THAI (1888/1907; 1879-1954) qui, dès son avènement, fit construire la tombe de son père l'Empereur DUC DUC (1853-1883), enterré
humblement à 200m de là, dans la Pagode Tuong Quang. L'Empereur DUC DUC fit partie de la série noire "TROIS ROIS AUX QUATRE LUNES" (TU NGUYÊT TAM VUONG), :
DUC DUC 1852-1883. Règna 3 jours avant d'être emmuré vivant (20 Juillet 1883-23 Juillet 1883) à 31 ans
HIÊP HOA 1847-1883. Règna du 30 Juillet 1883 au 29 Novembre 1883 où il fut contraint au suicide à 36 ans.
KIÊN PHUC 1869-1884. Règna du 2 Décembre 1883 au 31 Juillet 1884. Mort subite suspecte à 15 ans.
Les travaux de An Lang débutèrent vers 1890. En 1899, après avoir fait transférer les cendres de son Père, le souverain Thanh Thai, ordonna la
construction du mausoléé qui devient aujourd'hui sa propre sépulture et celle de son fils Duy Tân dont les cendres ont été rapatriés en 1987, 42 ans après sa mort en Afrique à 45
ans.
Situé au coeur d'une ville en plein développement, c'est un havre paisible et mélancolique. Contrairement aux autres mausolées de Huê l'architecture impériale ici est plus sobre tout en respectant les règles de la géomancie. Tous les tombeaux doivent tenir compte du sol et des éléments : le bois, l'eau, le souffle du vent, la lune , le soleil... La partie centrale doit être au carrefour des veines du dragon....
L'accès se fait par un immense portique à 3 entrées en briques puis un autre portique à triple entrée aussi.
Le mausolée où se trouvent les sépultures de l'Empereur Duc Duc et de l'Impératrice Tu Minh Huê / Pham Thi Diên (1855-1906) est une construction sur 5 niveaux; les 2 tombes sont séparées par le temple Huynh Oc.
Le Temple Long An abrite 3 autels : au centre l'Empereur DUC DUC et son épouse TU MINH, à gauche son fils THANH THAI, à droite son petit-fils DUY TÂN.
C'est le seul espace (6ha) à Huê où sont réunis les sépultures de 3 Empereurs. On y dénombre aussi 42 tombes de princes et princesse, 121 tombes de descendants (es) de la branche Duc Duc.
Ce lieu de Mémoire au coeur d'une Cité en marche, est aussi un lieu de Culture qui porte à la réflexion : la Puissance et la Gloire, le Pouvoir, la
fragilité et la vanité des êtres et des choses. Et on se surprend à espérer l'avènement de ce troisième millénaire universellement métissé prédit par Lévi-Strauss.
CE QUE DIT LA VOIX DES CHOSES
" J'aime le murmure de la brise, quand elle chante ou pleure dans les branches.
J'aime les confidences harmonieuses du vent aux arbres de la forêt, aux vagues de la mer, aux étoiles du firmament.
Mais plus encore ce qui me berce, me ravit, m'enchante, c'est la grande voix de l'Océan, la plainte universelle qui retentit dans le silence de la nuit comme un hymne sans fin.
Lorsqu'au coeur de l'été, je séjourne au bord des plages, je me plais à écouter dans l'insomnie les variations de cette grande voix. Dans les nuits paisibles, on dirait la respiration d'un Léviathan endormi,
à d'autres heures, la voix s'enfle, gronde, devient menaçante dans le fracas de la tempête. "
Le Prince possède et manie parfaitement la langue française grâce à son tuteur français Eberhard.
Il fut un francophone et francophile de la première heure.
L'Ile de la Réunion rend hommage à son illustre Invité d'autrefois en donnant son nom à un remarquable ouvrage : le PONT
VINH SAN à Saint Denis, chef-lieu de La Réunion. Dessiné par l'architecte Jacques LAVIGNE il a été réalisé par la Société Bourbonnaise de T.P. et de Construction. Livré en 1992, il fait
256m de long, 18,78m de large , hauteur 34,62m / 40,57m. Il enjambe la rivière Saint Denis en amont du centre Ville et relie le quartier de la Montagne au sud ouest à Bellepierre au
sud-est