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J'ai rêvé de cette Cité fabuleuse après avoir vu "Le voleur de Bagdad". Film 1940 d'Alexandre Korda : inoubliable Orient, aventures, humour, romance. C'était mon 8e anniversaire en ce printemps 1948. Je demandais à ma gouvernante de me montrer Bagdad sur le globe terrestre. Et j'y rêvais tous les soirs. Mon amour pour l'Arabie date de ce temps là. Le Prince Fahd qui n'était pas encore Roi, me disait : tu nous impressionnais avec tes yeux admiratifs ! cela voyait que tu es plein d'amour pour nous !
Alexandre de Marenches me promettait : "Je t'y emmènerai, un jour, souviens-toi, ils ont l'eau et le pétrole !". Avec Maître Jean-Louis Aujol et son ami le professeur Maarouf al-Dawalibi nous étions passés par la Syrie au printemps...les champs en fleurs (abricotiers ou amandiers ?) nous accueillaient somptueusement...!
C'est vers 760 que le Calife Al-Mansur fonde cette ville pour asseoir sa puissance.
Cartographes, médecins, astrologues devaient choisir l'emplacement idéal.
Ronde, fortifiée, elle fascine les Ambassadeurs étrangers par sa munificence.
Souverain éclairé le Calife la dote d'une immense université, y accueille tous les savants, les hommes de lettres et aussi tous les proscrits des écoles d'Athènes et d'Alexandrie. La ville est connue comme le plus grand centre culturel du monde, avec plus d'un million d'habitants alors que Paris n'en compte que cinq mille.
Un rayonnement universel jusqu'en 1258 lorsque Hilagu, le petit-fils de Gengis Khan, s'en empare et la fait brûler, détruisant sa bibliothèque et massacrant ses habitants.
En voyant aujourd'hui Mossoul encore brûlant sous les ruines, je me dis que l'Histoire est un éternel recommencement à travers les siècles.
Les désastres continuels de l'histoire, disait Arthur Koestler, sont dus principalement à l'aptitude excessive de l'homme, à son véritable besoin de s'identifier à une tribu, une nation, une Eglise, une cause, à en épouser les croyances sans réflexion et avec enthousiasme, même si les dogmes en sont déraisonnables, dénués d'intérêt pour l'individu et même contraires aux exigences de l'instinct de préservation.
On est amené ainsi à la conclusion peu conformiste que le malheur de notre espèce n'est pas un accès d'agressivité mais une aptitude excessive au dévouement fanatique.
Je constate une similitude entre les guerres menées par l'Amérique : Vietnam, Laos, Afghanistan et Irak.
Nos soldats occidentaux ne sont pas haineux comme ceux qu'ils ont en face d'eux. Ils ont peur, ils s'ennuient, ils souffrent de solitude, de misère sexuelle et de mal du pays....Pour vaincre ne n'est pas la supériorité technique, c'est la Rage, la Haine.
Le Bagdad de ma jeunesse n'existe plus. Il s'est évanoui avec les printemps d'antan.